Wearable Computing ou… « l’informatique vestimentaire ». Derrière ce mot très disgracieux se cache en réalité une histoire des technologies humaines et de l’émancipation. Il y a fort fort longtemps, l’invention de la jarre (la cruche, le pot, le récipient) permettait alors de transporter de l’eau, du feu, de la nourriture, libérant ainsi l’homme de la contrainte du lieu, lui permettant aussi de s’affranchir du temps en créant des réserves transportables. Nous avons fait beaucoup de chemin depuis mais structurellement, l’imaginaire qui se cache derrière l’informatique vestimentaire (le numérique que l’on porte sur soi) flirte toujours avec l’émancipation, la liberté. Avec nos smartphones / smartwatch / smart glasses / smart things, cela passe par la liberté d’accès à Internet. Partout, tout le temps. On transporte avec soi ses données, son accès, son réseau, sa communauté, ses souvenirs, sa mémoire, son travail, etc. Mais avec le vêtement connecté, l’imaginaire va encore plus loin.
Les lunettes connectées dans Star Trek
Un peu plus récemment, ce court documentaire vidéo de 1992 présente une vision prospective de la puissance technologique de demain. On rassemble tous les ingrédients de l’époque comme la téléphonie sans fil, les la tablettes informatiques (avec de grosses touches), les stylets, les gros éléments informatiques à porter sur soi. Si le futur avait été comme cela, nous aurions tous été très musclés j’imagine 😉
En 1992
En 1997
J’en profite également pour vous partager cette vidéo de 1997. Réalisée par John Allen et Richard Henkles de IBM, cette vidéo était en quelque sorte la première fois que l’on voyait un ordinateur de ce type, portable, presque invisible, élégant et futuriste. On remarque aussi la mise en scène esthétique incroyable et qui joue la surenchère. Cela me rappelle d’ailleurs un peu – de loin – l’esthétique de Ghost in the Shell.
En 2016
Et puis très récemment, j’ai regardé cette vidéo qui date d’avril dernier. Elle reprend les ingrédients habituels des vidéos anciennes comme les interactions gestuelles, les scènes de vie quotidienne, les objets interactifs souples, qui bougent, qui se déplacent… mais dans tout cela, l’esthétique a changé. Il y a des flares de lumière dans la vidéo qui est parfois filmée caméra à l’épaule, les couleurs sont vintages, il y a également un gros retour à la nature dans laquelle l’homme retrouve son activité physique, sportive. Ce qui est également intéressant dans cette vidéo prospective c’est qu’elle s’appuie sur des prototypes existants, des projets de recherches déjà aboutis. La fiction se mélange donc parfois habilement parfois maladroitement à ces séquences de demain.
Le wearable computing invisible ?
Depuis plusieurs jours je vois sur Facebook et Twitter, quelques personnes vraiment férues de technologies qui souhaitent franchir le cap de la puce connectée implantée dans la peau (ils se reconnaîtront). Que ce soit un simple capteur, une puce RFID, ou tout autre objet connecté / de stockage, le fait de s’implanter quelque chose dans la peau rend l’informatique vestimentaire totalement invisible. Cela ne provoque plus réellement d’imaginaire esthétique si ce n’est celle de la puce comme ci-dessous.
Je me dis qu’au final, l’informatique vestimentaire laisse sa place à l’humain, à sa peau, à son corps. Je ne le souhaite pas forcément mais je l’impression de le constater. Humain dans lequel, toute l’artillerie numérique est intégrée et plus rien n’est apparent si ce n’est en terme de datavisualisation ou de représentation sur un écran déporté. L’imaginaire futuriste se retrouvera-t-il confronté à une disparition de ses artefacts, de ses gadgets, de ses câbles, de ses ports, de ses soudures, de ses circuits, de ses écrans ? Que restera-t-il de l’informatique vestimentaire ? Peut-être plus grand chose ? Peut-être que l’imaginaire gardera une place dans la production de vêtements et d’objets qui se portent ? Peut-être que cela deviendra juste une mode du XXIe siècle ?