Ce midi, je découvre un projet qui me parle au sujet de notre rapport à la visualisation de données. Reuters vient de publier une enquête sur les températures insoutenables dans les prisons américaines, et ce qui m’interpelle… c’est autant le fond que la forme de leur travail.

L’équipe a collecté des milliers de relevés de température manuscrits, souvent illisibles, pour révéler une réalité terrible : près de la moitié des prisons d’État n’ont pas de climatisation. Mais comment transformer des milliers de notes sur papier en données exploitables ? Reuters a donc utilisé l’IA Gemini pour « lire » plus de 28 000 pages de documents californiens. Le résultat ? Un taux de précision de 95%, avec une marge d’erreur de seulement 3,5 degrés.

Ce qui me touche dans cette approche, c’est cet usage entre l’illustration par des humains et les données récupérées par la machine. D’un côté, des gardiens qui notent péniblement des températures à la main dans des cellules surchauffées. De l’autre, une intelligence artificielle qui déchiffre ces traces d’humanité pour en faire des graphiques nets et des moyennes froides. Quelque part, cela me rappelle mes premiers projets étudiants où je passais des heures à saisir manuellement des données… avant de découvrir qu’il existait des outils pour automatiser tout ça afin de pouvoir ensuite les illustrer ou les coder.

Comme toujours, je retrouve la même question : comment le design peut-il rendre visible l’invisible ? Reuters transforme ici des souffrances individuelles en patterns collectifs, des anecdotes en preuves. Leur méthodologie open source montre aussi une certaine éthique du partage des outils, toujours trop rare dans le journalisme contemporain.

Le tout a été mis en forme sur cette très belle page web. À visiter bien sûr 🙂

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